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Carnet de campagne de Cochinchine de Jean François Lacour (Carnet 1)

Expédition de l’Indo-Chine 1857 - 1858 - 1859

dimanche 12 avril 2009

J.F. Lacour Campagne de Cochin-chine 1er carnet qui relate son long périple en bateau pour rejoindre Saigon

Le 24 avril nous remettons à la voile et nous arrivons à Macao le 8 mai, après une navigation des plus chaudes. Cette partie du voyage semble assez longue, car nous n’avons plus comme dans l’étape précédente la vue de la Terre. Dans le détroit de la sonde nous avions été occupés à contempler la luxuriante végétation des terres que nous rencontrions. Le moindre rocher était couvert d’arbres et de verdure. Dans le détroit de Banca, les terres basses et presque noyées n’avaient plus la richesse de relief et de végétation que nous avions admirée dans le détroit de la sonde et on commençait à regarder couler l’eau le long du bord.

Il est vrai qu’on avait une grande distraction, c’était de voir les serpents d’eau défiler le long du bâtiment. Nous en avons compté parfois plus de cent en moins d’une heure. La vue de la côte en approchant de Macao, n’a rien de remarquable et je ne connais pas la ville car on ne nous a pas permis d’y descendre. Je l’ai regardé à la longue-vue, ce qu’on voit du côté de la mer ressemble aux habitations européennes de Singapour. Le climat paraît y être assez sain et on a établi à Macao un hôpital provisoire pour la Marine.

Le supplice de Tautale (?) n’a pas duré longtemps pour nous. Nous sommes restés un jour seulement devant Macao et nous sommes partis pour Hong Kong, à l’entrée de la rivière de canton en quelques heures nous y étions le 9 mai. La rade formée par diverses îles, qui se trouvent à l’entrée de la rivière est parfaitement fermée et abritée. Nous trouvons là un grand nombre de navires de toutes les nations et j’ai la chance de retrouver sur la frégate anglaise Nankin un lieutenant de vaisseau avec lequel j’ai fait connaissance sur le parlhet (?) en revenant à 1855 des Antilles en France.

La ville de Hong Kong est en quelque sorte toute neuve et on est frappé du développement qu’elle a prise, quand on se reporte à son origine récente. Les rues nouvelles sont spacieuses et bien percées, les habitations anglaises sont d’une élégance remarquable est parfaitement disposées pour le climat. De larges galeries couvertes devant les appartements ; partout de l’ombre et de l’air. Les casernes des troupes anglaises sont magnifiques et on n’a mesuré aux soldats ni l’air ni l’espace. Les cipayes sont plus simplement logés et les régiments qui passent ici, venant de l’Inde pour être envoyés en Chine, sont baraqués dans de grandes cases en bambous et en roseaux. Je visite l’arsenal et le magasin militaire. Le garde magasin à qui nous avons affaire pour des relations de service nous reçoit fort bien, nous offre du Madère et nous fait voir des curiosités, des armes et autres objets venant de canton. Une grande récréation pendant quelques jours, était la visite des bazars. Mais toutes ces merveilles de l’industrie patiente des Chinois lassent vite. Nous trouvions partout les mêmes objets : crépons, éventails, meubles et boîtes en laque en ivoire ou en [ ]. Il y aurait bien des choses à acheter, mais dans l’incertitude où nous sommes de notre destination et de la durée de notre voyage on ne peut pas s’embarrasser. Cependant deux ou trois jeunes époux, se résigne à payer des ports fabuleux pour expédier à leur chérie quelques petits cadeaux, par l’avion de la poste de Suez. Pour mon compte, j’espère avoir le loisir plus tard de faire mes emplettes à l’aise. Les environs de la ville sont assez pittoresques, nous y faisons quelques promenades sans cependant nous aventurer trop loin, par prudence. On dit que le mandarin voisin de Hong Kong à mis nos têtes à prix et même à un très beau prix.

Dans la principale rue, à l’extrémité de la ville s’élève une pyramide funéraire élevée à la mémoire des Américains et Anglais (en nombre d’une douzaine) tués dans un combat contre des pirates, à bord du Pawathan et [ ]. Sur la même route, près d’une charmante petite vallée où se tiennent les courses, un monument tout semblable a été élevé aux officiers et matelots de la frégate anglaise Vestale, décidée pendant la station de 1843 à 1847.

Les quartiers chinois de Hong Kong sont fort curieux à voir, on y est en pleine Chine, moins la police anglaise et les marins de toutes les nations qu’on trouve dans les rues. Les Chinois sont rarement agresseurs, et se contentent de vous voler quand ils peuvent le faire par derrière. Un de nos officiers, assez vilain oiseau, au moral, se promenait seul (car personne ne veut de lui) on lui enleva sa montre de [ ] en plein jours et de force. En sa qualité de juif, il a des économies, il n’y a donc que demi-mal.

La rade n’est pas défendue. L’entrée est les diverses passes sont libres. Les rares batteries qui avoisinent la ville, semblent disposer bien plus pour la mitrailler au besoin et écraser l’ennemi du dedans que pour la défendre contre une attaque du dehors. Nous trouvons sur les hauteurs deux postes fortifiés qui semblent garder des passages conduisant à l’intérieur ; mais je n’en puis comprendre l’utilité, la ville étant complètement ouverte par mer, sur un développement de 2 ou 3 km.


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